L’arrière-grand-père maternel blessé à la guerre, le grand-oncle paternel victime d’un accident de la route, une arrière arrière-grand-mère paternelle dont plusieurs enfants sont décédés en bas âges… tous ces traumatismes laissent des marques dans les gènes de chacune des générations suivantes (ça fait un peu de monde !), pour arriver jusqu’à nous puis nos descendants, et ainsi de suite.
Ces transmissions nous impactent d’une manière ou d’une autre dans nos comportements, nos actions quotidiennes, nos façons d’être. Déterminer en quoi et comment cela nous impacte est un des objectifs des séances de psychogénéalogie, le suivant étant de s’en libérer. Mais alors, de quelles « valises » transgénérationnelles avons-nous personnellement héritées ?
Tout d’abord, revenons sur les différentes transmissions possibles.
Il y a bien sûr les transmissions dont on a conscience car il s’agit de pensées ou de paroles directement émises entre les membres d’une famille, généralement entre grands-parents, parents, enfants. Ce sont des transmissions dites intergénérationnelles qui peuvent aussi se matérialiser par un métier exercé de père en fils, des habitudes ou des rituels propres à la famille, ou plus subtilement des manières d’être reproduites, comme par exemple « être à cheval » et exiger un rangement militaire comme papy, ou avoir la « main verte » comme mamie.
Les autres transmissions sont transgénérationnelles, elles se transmettent par des liens invisibles qui connectent les membres d’une même famille entre eux sur plusieurs générations. Il s’agit dans ce cas de pensées non « digérées » représentant des maladies, des secrets, des non-dits, des choses cachées qui refont surface sur les descendants. Ce lot de traumatismes non résolus vécus par nos ancêtres nous sont donc gentiment légués…
Tout cela fait partie du mythe ou du « système » familial décrit par Anne Ancelin Schützenberger comme étant un « ensemble d’unités mutuellement interdépendantes » dont les règles ne sont pas portées à la conscience des membres de la famille. Autrement dit, nous reproduisons inconsciemment ce que nos parents nous ont appris, éducation qu’eux-mêmes ont reçu de leurs parents et ainsi de suite. Ce sont finalement leurs blessures et leurs conditionnements qui vont, en partie, nous influencer dans nos vies.
Dans son livre Aïe mes aïeux (p.30), elle écrit « Pour Ivan Böszörményi-Nagy (psychiatre, il fût le précurseur de la thérapie familiale et de la psychogénéalogie), l’individu est une entité biologique et psychologique dont les réactions sont déterminées tout autant par sa propre psychologie que par les règles du système familial […] dont les fonctions psychiques d’un membre conditionnent celles d’un autre membre. »
Les mémoires transgénérationnelles sont des héritages invisibles qui se manifestent dans nos quotidiens à travers les maladies, les addictions, les phobies, ou par l’expression d’émotions négatives qui, au fond, ne nous appartiennent pas et que l’on a même du mal à comprendre.
Mais alors, comment lâcher ces valises et nous « déshériter » !?
Grâce à un travail d’analyse, il est possible de repérer nos blocages et nos vieux schémas, ceux-là même qui nous sécurisent, qui nous rassurent, mais qui nous empêchent d’être pleinement en accord avec nous-même. Ainsi, en reconstituant l’histoire familial (à replacer aussi dans le contexte historique) nous pouvons prendre conscience puis dépasser ces traumatismes, ces blocages, ces schémas répétitifs néfastes avec lesquels nous ne sommes plus en adéquation afin de s’en libérer et de regagner une certaine sérénité.